LE BÉBÉ ET SON LIBÉRATEUR

Un petit chinois

Dans le chapitre précédent, je vous ai raconté quelque chose des brigands qui dévastent certaines régions de la Chine, et de la rançon qu'il fallut payer pour délivrer un homme de la mort. Nous avons aussi dit un mot du prix qui a dû être payé pour nous racheter, vous et moi, de la mort éternelle. Aujourd'hui je voudrais vous parler de quelqu'un qui paya la rançon nécessaire pour racheter un petit bébé et sa mère à ces mêmes brigands -- cette personne est appelée le libérateur ou le Rédempteur.

A quelque distance de l'endroit où nous vivons, se trouve une ville commerçante nommée Daikow. Dans cette ville habitait une femme d'une cinquantaine d'années, qui portait le nom de Slaam Shaan. Son fils était un négociant dont le magasin était fort bien achalandé. Sa femme et ses trois enfants vivaient avec lui, mais ils étaient tous originaires d'un village de pêcheurs situé à quelque distance de la ville, sur un point retiré de la côte. Depuis plusieurs années, la contrée environnante avait plus ou moins souffert de la part des brigands, mais cette région avait été épargnée jusqu'ici et les habitants, y compris Slaam Shaan et sa famille, menaient une vie facile et confortable.

Il y a environ quatre ou cinq mois les brigands se rapprochèrent de Daikow. Le négociant envoya sa mère, sa femme et ses enfants dans leur village natal qu'il jugeait moins exposé que la ville, et lui-même resta en arrière pour prendre soin de ses affaires. Peu après les brigands envahirent la ville, brûlant et pillant tout ce qu'ils rencontraient. Le fils de Slaam Shaan s'échappa du magasin au moment où la maison allait être détruite par les brigands, et chercha à gagner le village où s'était réfugiée sa famille; mais en route il fut brutalement assassiné.

Après avoir saccagé Daikow, les brigands s'attaquèrent aux villages avoisinants, et atteignirent bientôt celui de Slaam Shaan, incendiant tout devant eux. Les habitants se réfugièrent dans une haute tour, mais ce fut en vain. La tour fut prise, une partie des malheureux furent mis à mort, et les autres, hommes, femmes et enfants, emmenés prisonniers pour n'être libérés que contre rançon. Les brigands s'emparèrent de toutes leurs possessions et laissèrent le village en ruines.

Slaam Shaan, sa belle-fille et ses petits-enfants étaient parmi les prisonniers. Au bout de quelque temps Slaam Shaan et deux des enfants furent relâchés afin qu'ils pussent travailler à obtenir la somme exigée comme rançon pour la belle-fille et le bébé. Cette somme était très élevée, et, quoique Slaam Shaan fît tout ce qu'elle pût pour trouver de l'argent, mettant ses champs en gage et empruntant de tous côtés, elle était encore loin de compte. Sa belle-soeur, une femme âgée qui avait mis de côté une petite somme pour ses vieux jours, lui céda son maigre pécule, mais malgré tous les efforts, le chiffre de la rançon n'était pas encore atteint. Au moment où on désespérait d'y arriver jamais, les brigands réduisirent soudain le prix demandé. La pauvre mère et son enfant étaient si amaigris et paraissaient si malades que les malfaiteurs craignaient de ne rien recevoir du tout s'ils attendaient davantage.

Vous pouvez bien penser que les négociations ne furent pas longues. Mais je vais vous faire lire un fragment de la lettre qui me racontait l'histoire. (J'étais absent lorsque ces événements se déroulèrent).

"C'est hier que l'argent de la rançon a été prêt, et tout l'après-midi Slaam Shaan est restée assise à sa porte, attendant de recevoir l'ordre d'aller chercher sa belle-fille qui devait arriver de Haap Shaan par le bateau, avec les brigands. Tout l'après-midi elle resta là; son visage portait une expression de joyeuse attente; elle était trop heureuse pour parler. Cependant aucun messager n'apparaissait et sa figure s'assombrissait sous l'empire de l'anxiété et du désappointement; à la fin la nuit vint et la pauvre femme était toujours à la même place, guettant le messager. Cela nous fit penser au Sauveur, notre précieux Seigneur, ayant la rançon toute prête et attendant que les âmes viennent à Lui. Combien son coeur désire les recevoir! Cela fait aussi réaliser combien on peut être reconnaissant de pouvoir travailler à chercher de telles âmes pour l'amour de Christ qui les désire et les attend."

Enfin le moment vint où il fallut fermer la porte, sans qu'aucun messager eût paru. Vous pouvez vous imaginer le chagrin de la pauvre Slaam Shaan lorsqu'elle dut rentrer seule dans sa maison.

Avez-vous jamais réfléchi, chers enfants, que bientôt, très prochainement, le Sauveur qui attend si patiemment que vous veniez à Lui, devra se lever et fermer la porte; et que beaucoup seront laissés dehors, simplement parce qu'ils n'ont pas voulu venir quand Il les a suppliés de le faire? Quelle terrible chose ce serait si le Sauveur était obligé de vous laisser dehors; vous qu'Il a engagé si souvent à venir à Lui; vous qu'Il a aimé au point de donner sa vie pour vous; vous auquel Il dit encore en ce moment: "Détournez-vous, détournez-vous, pourquoi mourriez-vous?" Pour Slaam Shaan il y avait encore l'espoir du lendemain; mais quand la porte sera fermée devant vous, cela voudra dire que vous serez perdu, perdu pour toujours, et absolument sans espoir, -- pour toujours loin de Dieu, dans les ténèbres du dehors! Comment pouvez-vous attendre un jour de plus sans venir à Celui qui est votre rançon aussi bien que votre Rédempteur?

Je suis heureux de pouvoir vous dire que le lendemain, de bonne heure, le messager arriva, et Slaam Shaan accompagnée d'un ami le suivit; chacun d'eux portait un panier plein d'argent. Deux heures après le petit groupe revenait, Slaam Shaan et sa belle-fille pleurant de bonheur. Quelle joie que celle du Rédempteur et quelle joie que celle du racheté! je me demande si mon lecteur a jamais éprouvé la plus merveilleuse de toutes les joies, celle de rendre heureux le coeur du Sauveur, du Rédempteur?

"Il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent." (Luc 15:10.)

 

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