LETTRE SUR LE CULTE


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...Quant au sujet dont vous parlez, je l'ai moi aussi à coeur depuis longtemps. Je ressens fortement ce qu'il comporte, mais je me sens incapable d'exprimer convenablement ce sentiment. Il y a des réunions qui comptent parmi mes plus précieux souvenirs, de ces réunions où il semble qu'on puisse presque voir et toucher Celui qui est présent avec ceux qui sont rassemblés à Son nom. Je me souviens de l'une d'elles, où l'esprit d'adoration nous remplissait au point que, en chantant une hymne d'adoration, les voix s'éteignirent l'une après l'autre, et qu'on n'en entendit que deux terminer le verset; les coeurs étaient trop pleins pour parler, et nous ne pouvions maîtriser notre émotion.

Mais combien souvent nous quittons le local après le culte avec un sentiment de déception! Nous avons "joui de la réunion", comme on dit, et il se peut que nous ayons été édifiés; cependant quelque chose manquait, et ce quelque chose, c'est ce qui était dû à Dieu et que nous ne lui avons pas rendu. Cela est difficile à exprimer, mais non à ressentir, et à reconnaître. Quand dans un bouquet ou dans un fruit le parfum ou l'arôme font défaut, l'oeil ne peut le percevoir, mais toute la beauté déployée devant les yeux ne compense pas ce qui manque.

Je veux donc vous donner ma pensée sur l'adoration et le culte, avec la conviction qu'elle est selon la Parole de Dieu; mais je ne veux pas indiquer toujours les passages, vous laissant y découvrir, si vous en avez le désir, la délicatesse du parfum, -- la bonne odeur des quatre "drogues odoriférantes" réservées pour Dieu seul -- l'"encens composé" que nous ne pouvons pas faire pour nous-mêmes, mais qui est "saint, consacré à l'Éternel". Mais, notez-le, c'est pour Lui que nous faisons cet "encens composé". Assurément il représente le Seigneur Jésus, béni éternellement, Lui, le Fils unique de Dieu, mais l'encens s'élève quand le sacrificateur le met sur le feu tiré de l'autel d'airain -- ce quadruple parfum, pilé très fin, et brûlé sur l'autel d'or près du voile.

Transposez ces symboles dans le langage du Nouveau Testament, et vous aurez l'essentiel de la réponse à votre question. Peut-être la suite de ma lettre l'embrassera-t-elle plus complètement. Mais laissez-moi faire d'abord une sorte de dictionnaire des termes, en commençant par notre côté, celui de notre approche de Dieu, et en allant de l'état de "pécheurs sauvés" jusqu'à notre position devant Dieu "dans les lieux saints".

Avant cet état, tout est du "moi", et rien de Dieu: mais quand nous adorons tout est de Dieu, et rien de nous.

Quand, une fois "nés de nouveau", s'éveille en nous le sentiment de nos besoins, et que nous demandons ce qui nous manque, nous prions. Puis, à mesure que les grâces de Dieu abondent et que nous prenons conscience qu'Il connaît tous nos besoins et qu'Il y pourvoit dans Son amour, nous Lui rendons grâces pour les bienfaits reçus.

Apprenant davantage de notre Dieu -- le Père du Fils -- par l'Esprit, nous reconnaissons Sa grandeur, Sa gloire -- Ses gloires comme Créateur comme Rédempteur, et aussi comme Conservateur, et nous louons. Mais il y a encore un autre degré d'élévation: nous sommes consciemment "dans les lieux saints par le sang de Jésus", et Dieu est devant nous: la personne et pas seulement les attributs. Nous nous prosternons devant Lui (le mot adorer signifie primitivement s'agenouiller ou se prosterner, comme dans Matthieu 2,11), pour ce qu'Il est en Lui-même, le moi est oublié, de sorte que nous ne prions ni ne remercions: nous nous prosternons, nous adorons. Ce sera notre heureuse occupation dans le ciel; ici-bas, dans notre faiblesse, nous y aspirons plutôt que nous n'y parvenons. Notre adoration ici-bas sera mêlée de louange -- ce qui est le plus proche de l'adoration -- et souvent aussi du souvenir de ce que nous sommes, de sorte que nous rendons grâces aussi; et à un degré inférieur encore intervient la prière. Mais si nos pensées sont allées de concert nous distinguerons ces différents exercices l'un de l'autre. Le fondement de tous, c'est la croix, à laquelle correspond l'autel d'airain. C'est à cet autel que le sacrificateur vient prendre le feu, symbole du jugement d'un Dieu saint sur le péché, porté par Son Fils, notre Sauveur. Sur la sainteté intrinsèque de Celui-ci, représentée par l'or de l'autel des parfums, le feu peut être placé en toute assurance, et par-dessus est mis l'encens: le parfum qui s'en élève est la portion de Dieu. Et quand, le grand jour des propitiations, le souverain sacrificateur pénétrait au-dedans du voile, les mains pleines d'encens pulvérisé (des mains remplies représentent la consécration), "la nuée de l'encens" le mettait à l'abri du jugement du Saint d'Israël, pendant qu'il présentait Israël à l'Éternel son Dieu.

Appliquons cela à notre réunion de culte. Mais d'abord, comme exemple de l'Écriture, ne manquons pas de lire les psaumes 28, 29 et 30, en liant le premier à la prière, le second à l'adoration et le troisième à la louange.

Nous venons nous souvenir du Seigneur Jésus. Les symboles sont un mémorial de Lui: la manne, Sa chair, Son sang, sont les symboles dont Il use en parlant de Lui-même. Il prend aussi le pain et la coupe, rompt le pain, sépare la coupe du pain, et commande à Ses disciples de les distribuer entre eux. Ces actes non seulement font de ces symboles un mémorial, pour nous, du Seigneur Jésus, de Sa Personne, mais le fait de manger le pain rompu et de partager la coupe proclame Sa mort. De sorte que la Cène du Seigneur est le souvenir de notre Sauveur, de notre Seigneur Jésus, dans Sa mort. C'est la pensée essentielle de la réunion de culte, et rien ne doit s'y immiscer ni l'obscurcir.

Mais nous ne pouvons penser à Sa mort sans y associer le but et les résultats de cette mort, pour Dieu et pour nous. Pouvons-nous mieux faire que suivre notre Seigneur Lui-même dans les psaumes 22 et 102? Il souffre sous la main de Dieu, mais Il le glorifie; Il loue, mais comme Celui qui conduit la louange dans la grande congrégation; les résultats finaux sont encore à manifester dans Sa seigneurie sur la terre et la bénédiction des peuples terrestres.

Il ne nous est pas donné de règles pour une telle réunion, si ce n'est l'enseignement général d'Actes 20 et de 1 Cor. 14, de sorte que nos sens spirituels doivent être éveillés et prompts à faire tout ce qu'il nous est convenable de faire, avec à-propos et avec ordre. Si nous pensons à l'objet de la réunion, et si nous sommes conscients de la Présence invisible, soumis à son Esprit (par "nous", j'entends chaque personne présente), nous nous réunirons à l'heure fixée, et nous nous attendrons au Seigneur. L'assemblée louera ou adorera, soit en élevant ensemble la voix dans une hymne de louange ou d'adoration, soit par une seule voix s'exprimant intelligiblement.

L'Évangile de la grâce, si indiciblement précieux qu'il soit, n'est pas ce qui occupera. Les épreuves du chemin, notre pèlerinage, seront oubliés. Nous n'avons là aucun besoin, rien ne nous manque. Le coeur est rempli, il déborde, l'assemblée ne peut que louer et adorer; ce peut être en silence ou à haute voix, peu importe. Il n'y a qu'"un commun accord, une même bouche" glorifiant Dieu. Jésus est devant nous; Sa Personne, Sa mort. Nos mains sont remplies de Lui, encens "pilé très fin": la compréhension de l'un peut être plus grande que celle d'un autre, cela n'importe pas en ce moment, où il n'est pas question de la mesure de Lui que je suis capable de recevoir, je suis rempli, aussi peu que je puisse contenir de Lui. Le saint âgé, éprouvé, qui a marché depuis tant d'années avec Jésus et Le connaît intimement -- un "père" -- est rempli; le petit enfant qui ne fait que commencer la route est rempli. Il ne s'agit pas ici de capacité: Jésus remplit chaque capacité, grande ou petite. Oh! comme j'aspire à me trouver dans une telle réunion! Peut-il y avoir une règle, un ordre prescrit pour son déroulement? Une hymne, une voix exprimant l'adoration de l'assemblée, une portion de Sa douce Parole dont la lecture nous fait d'autant plus goûter le sentiment de Sa présence, peuvent ou non précéder le solennel accomplissement du seul rite qui nous est enjoint, la Cène. Maintenant nous "rendons grâces", nous tous, l'assemblée, du moment que quelqu'un se lève pour l'exprimer pour nous. Je ne sais qui ce sera; celui qui a un don hésitera le plus longtemps, de peur de s'interposer entre le Saint Esprit et Son choix du porte-parole.

Si le Saint Esprit est laissé libre de conduire l'assemblée, Il choisira l'aspect particulier de Jésus qui est à propos, car nous ne pouvons Le voir maintenant dans toutes ses gloires à la fois. Alors cantiques, portions de l'Écriture, expressions de l'adoration de l'assemblée, tout sera en harmonie avec le thème ainsi choisi. Il n'est besoin d'aucun arrangement préalable, mais seulement de s'attendre véritablement à Lui. Et la réunion se terminera dans la même harmonie: s'il y a une parole pour l'édification ou l'exhortation, elle sera telle qu'elle ne paraîtra une dissonance à personne. Mais il s'agit toujours d'une réunion où l'on s'adresse à Dieu, tournée vers Dieu, aussi n'y a-t-il là ni place ni temps pour l'exercice des dons, encore moins pour une longue harangue ou une prédication.

Si j'ai bien tracé avec justesse les grandes lignes d'une telle réunion, nous ne nous enfoncerons pas dans l'ornière d'une forme ou d'une routine. Il n'y a pas non plus de règle pour s'adresser au Père plutôt qu'au Fils en rendant grâces à la table. Qu'il en soit selon que l'Esprit conduit. Il n'y a qu'une règle, c'est d'être soumis à l'Esprit. Alors toutes choses seront faites "avec bienséance et avec ordre". L'Esprit emploiera qui Il a choisi, Dieu sera adoré, notre Seigneur Jésus remémoré, et le fidèle quittera la salle comme quelqu'un qui a eu un avant-goût du ciel.

Mais combien une telle réunion est rare! Car il suffit que quelqu'un ne soit pas en accord avec le thème de l'Esprit pour que l'harmonie soit troublée, sinon détruite. En particulier si ce quelqu'un prend part à haute voix à la réunion, pour indiquer un cantique, ou lire une portion de la Parole hors de propos, ou prier alors qu'il n'est pas en état d'adorer. Que va faire alors l'adorateur? Rien, si ce n'est posséder son âme par la patience, se joindre quand il le peut à ce qui est dit, et, quand il ne le peut pas, demeurer avec Dieu seul.

... A vous dans l'amour de Christ.

C.H.H.


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